Le plus grand vignoble du monde s’arc-boute face à la crise climatique. Des terrasses du Larzac à la plaine de Montpellier, vignerons, chercheurs et acteurs de la ruralité se mobilisent, en Languedoc, pour s’adapter à un dérèglement qui s’accélère.
C’est une certitude pour de nombreux viticulteurs, l’adaptation climatique est désormais un « enjeu de vie ou de mort» pour le secteur viticole en Languedoc. Manifestation funeste de ce péril, la journée caniculaire du 26 juin 2019 est encore sur toutes les lèvres. Une journée lors de laquelle le mercure est monté à 46° à l’ombre.
« Jamais on avait connu une brûlure pareille contrairement aux épisodes de sécheresse prolongée qui deviennent la règle, de grêle ou de fortes pluies qui ruissellent et que l’on appelle ici les cévenoles » se souvient Lise Fons-Vincent, cheville-ouvrière du domaine de Fourques, non loin de Montpellier. « Mais cette chaleur, jamais je n’ai vécu quelque chose de pareil ».
Cofondateur avec sa femme du domaine de Saumarez, à Murviel-les-Montpellier, Robin Williamson se souvient s’être réfugié dans sa cave, ce jour-là pour échapper à la chape de plomb, avant de découvrir les plants brûlés de son domaine. Ce matin du 3 septembre 2020, il revient sur les lieux avec un groupe de huit jeunes vendangeurs. Sécateurs en matin, chapeau bien arrimés, Romain, Maud, Janneke, Pedro et les autres sont parés pour récolter les grappes d’une parcelle de quelques hectares. Chétives, une partie des vignes plantées dans ce domaine bio sont encore à la peine.
« Ces vignes sont jeunes et le raisin était encore totalement vert le matin du 26 juin 2019 » se souvient Robin.
« Quand je suis repassé en fin d’après-midi, il était noir, brûlé, comme si on avait passé un chalumeau. Il n’y avait plus une feuille et il devait faire 55 à 60 degrés au soleil.
Cela a été un choc énorme pour nous après quinze années intenses de travail pour élever ces vignes en visant la qualité dans le respect le plus profonds de la nature.
Tous les bourgeons qui étaient portés sont morts, si bien que nos rendements en seront affectés cette année…».
Banquier londonien, Robin a fait le choix de déserter le monde de la finance, à 27 ans en 2002, pour s’enraciner avec Liz, son épouse néo-zélandaise, dans celui de la viticulture . Il a, concède-t-il, vu son salaire “diminuer par dix”. Mais son attachement à ce nouveau destin semble plus fort que tout.
« Même si mon tarif horaire équivaut aujourd’hui à l’équivalent du Smic, je ne veux pas revenir en arrière. Nous nous sommes intégrés, avons des enfants nés en France et soutenons depuis notre installation le principe de vignobles résilients ».